J.R. Bourguignat, « Remarques sur la brochure de M. Tassinari », Paris, Revue et Magazine Zoologique, série 2, t. XI, 1859, p. 545-546.
Monsieur le Directeur,
En parcourant votre dernier numéro, j’ai trouvé dans la Lettre conchyliologique de M. Henri Drouët, de Troyes, à la page 497 de votre Revue, une si singulière appréciation d’une brochure (1) de M. Tassinari, que je ne puis pour l’honneur des malacologistes français, la laisser passer.
M. Tassinari a décrit dans cette brochure, sous le nom de Valvata agglutinans, « une curieuse Valvée », dit M. H. Drouët. – « Une des particularités de ce Mollusque, ajoute l’auteur des lettres conchyliologiques, c’est de consolider sa mince et fragile demeure en la recouvrant de petits grains de sable ».
Or, « cette curieuse Valvée, » cette intéressante coquille, n’est autre chose qu’une enveloppe de larve de Névroptère, de l’ordre des Phryganides.
M. Tassinari n’est pas le seul qui ait pris une de ces enveloppes de larve d’Insecte pour une coquille. – Plusieurs auteurs ont commis également cette erreur.
Ainsi, M. Benoit, de Messine, dans son ouvrage sur les Mollusques de Sicile, a fait figurer à la pl. VII, fig. 32 et 33, sous le nom de Valvata crispata, deux variétés de ces tubes ou fourreaux.
Lea (in Transact. Of the Americ. Philo. Soc., vol. IV, p. 104, pl. XV, f. 36, A. B.) a élevé aussi deux de ces enveloppes au rang d’espèces sous les noms de Valvata agglutinans et arenifera. – Gruner (Verzeich. der conch., p. 30, 1857) a reproduit, d’après Lea, ces mêmes espèces.
Swainson (Lander’s Cab. Cyclop., n° 123, p. 226) a été plus loin, il a établi pour elles le genre Thelidomus.
Enfin la Serpula ornata de Lea (Contrib. Of conch., p. 37, pl. I f. 5,, 1883), la Serpula granifera de Say, in Morton, du terrain tertiaire de Maryland, dans les Etats-Unis ;la Pectinaria belgica de Gould (Mol. Massach., p.7).- Les Dentalium nigrum de Lamark, corneum du même auteur (An. S. vert.) (non Linnaeus) ; le Dentalium pellucidum de Linnaeus (Syst. Nat ?) ; le Dentalium n°9 du Genera of shells de Sowerby, etc., etc., ne sont point des coquilles, mais simplement des tubes de larves d’Insectes.
Que M. Tassinari, sans conseils, peut-être sans livres ait, un peu à la légère, pris une enveloppe de larve pour un Mollusque, cela se conçoit encore ; mais qu’un malacologiste français, dans un travail spécial de critique conchyliologique, considère un de ces tubes comme une « curieuse coquille » (p. 497), cela est un peu trop fort.