Cette pièce est nécessaire à sa perfection

Collectif, article rédigé par Olivier & Latreille, Nouveau Dictionnaire d’Histoire Naturelle Appliquée aux Arts, tome IX, Paris, Chez Deterville, 1803, p. 87-88.

Frigane
.. /..
Les Larves et les nymphes de toutes les friganes connues vivent dans l’eau. On les trouve dans les marais, dans les étangs et les ruisseaux.Elles sont logées dans des fourreaux portatifs, qu’elles font avec de la soie et qu’elles recouvrent de différentes matières; elles les traînent partout avec elles.
Ce fourreau ou tuyau, dans lequel le corps de la larve est logé a sa partie intérieure lisse et polie, sa partie supérieure est couverte de fragmens de diverses matières propres à la fortifier et à le défendre ; les dehors sont souvent hérissés et pleins d’inégalités. Certaines larves font les leurs de différents morceaux, qu’elles arrangent avec symétrie les uns auprès des autres. Quand ce fourreau devient trop court ou trop étroit, elles en font un autre d’une grandeur proportionnée à leur corps; quelquefois le neuf diffère. plus de celui qu’elles ont quittés, que nos habits d’aujourd’hui ne différent de celui de nos aïeux parce qu’elles se servent de matériaux qui n’ont aucun rapport entre eux. Elles y emploient des feuilles ou des parties de feuilles de plusieurs espèces de plantes, de petits bâtons cylindriques, ou irréguliers, des tiges de plantes, des roseaux, des brins de joncs, des graines de terre, des coquilles aquatiques enfin toutes les matières qu’elles trouvent dans l’eau. Tels fourreaux ne sont faits que de l’un de ces matériaux, ce sont les mieux façonnés; d’autres sont composés de tous ces matériaux si peu propres à être assortis; aussi paraissent-ils des habits très-bizarres.
Chaque fourreau a intérieurement la forme d’un cylindre, dont chaque extrémité a une ouverture ; celle par où la larve fait sortir sa tête et ses pattes est plus grande que l’autre, qui est placé au milieu d’une plaque circulaire, appliquée au bout du fourreau qu’elle bouche en partie.
Presque tous les fourreaux recouverts de feuilles sont plats, mais on en voit rarement de cette forme; communément ils sont cylindriques: il y en a dont tout l’extérieur est composé de brins de jonc collés les uns contre les autres. Mais de quelque matière qu’ils soient couverts, il est rare d’en trouver qui n’aient pas quelque pièce qui dépare le reste, et cette pièce est nécessaire à sa perfection. Quelquefois c’est un morceau de pierre, un caillou ou une coquille de limaçons aquatiques, ou des coquilles de moules, qui renferment les animaux vivans.
Les fourreaux construits de matériaux si pesans, , deviendroient un fardeau pour l’Insecte s’il était obligé de marcher toujours sur terre. Mais comme il doit marcher, tantôt au fond de l’eau, tantôt à sa surface et sur les plantes qui y croissent, il lui coûte peu à porter, si les différentes pièces dont il est construit sont d’une pesanteur à peu près égale à celle de ce liquide : c’est ce qu’il semble se proposer en y attachant des corps dont la pesanteur spécifique est moindre que celle de l’eau.